Petit manifeste du jourdanisme

En réponse -et clin d’œil- à certains détracteurs néanmoins très respectés de mes convictions, voici un petit manifeste du « jourdanisme » (terme qui, je vous rassure n’émane pas de ma part d’ombre ego-tique, mais de la dérision entourant la discussion privée à laquelle je fais référence 😉 ) … Ce manifeste n’a évidemment aucune prétention exhaustive, car une soirée de travail n’y suffirait alors certainement pas, mais permet de clarifier les « bases » de ma réflexion à cet un instant t… A suivre…

Jean-Baptiste Jourdan, marechal napoléonien

1. Le jourdaniste est avant tout un humaniste. Il croit en l’Homme, dans sa capacité à progresser,  à faire le bien autour de lui. De fait, le jourdanisme refuse le discours stigmatisant consistant à opposer les « gentils » des « méchants ». On est tous le gentil ou le méchant de quelqu’un un jour ou l’autre (de même qu’on est toujours le con d’un autre 🙂 ).

2. Le jourdanisme n’est pas journalisme. Le jourdaniste s’oppose d’ailleurs au quasi-monopole de la liberté d’expression revendiqué et souhaité par certains, monopole qui prend forme dans le statut de journaliste. Le jourdaniste blogueur ne s’exprime qu’en tant que simple citoyen et ne prétend donc à aucune vérité et encore moins neutralité. En revanche, le jourdaniste s’impose honnêteté intellectuelle et authenticité.

3. Le jourdaniste est égalitaire. Il est donc formellement opposé à toute forme de privilège. Par exemple, aider un secteur, une entreprise, une branche, c’est avant tout ne pas aider les autres qui, ayant la même situation, pourraient  également y prétendre. Il est donc préférable de ne pas octroyer la moindre aide à quiconque si cette aide n’est pas applicable à chaque entité pouvant y prétendre selon les critères retenus pour la première entité en bénéficiant.

4. Aux grandes organisations centralisatrices de pouvoir, le jourdaniste préfère les petites organisations, qui, lorsqu’elles n’ont plus lieu d’être, peuvent s’effacer pour ne pas devenir des parasites bureaucratiques incontrôlables et créatrices de déséquilibres. Il existe néanmoins certaines organisations centralisatrices inévitablement nécessaires (qui comprennent, pour simplifier, les fonctions régaliennes de l’État).

5. Le jourdaniste est un fervent défenseur du progrès technologique, à la condition que  technologie ne soit pas aliénatrice mais au contraire émancipatrice. Internet, parce qu’il permet avant tout de connecter des Hommes entre eux, joue un rôle tout à fait favorable.  Mais la technologie n’est pas bonne ou mauvaise en soi. C’est l’utilisation qu’en font les Hommes qui l’est (d’où l’importance du point 1 d’ailleurs).

6. Le jourdaniste se veut acteur de sa vie et dans son quotidien. Il est donc créateur. Mais à la quantité, le jourdaniste préfèrera toujours la qualité, la valeur ajoutée. il ne cherche donc pas la création acharnée, mais ce qu’il crée se veut le fruit d’un authentique travail. Le jourdaniste évitera donc la copie maladroite et stérile, pour y préférer la mention du travail de quelqu’un d’autre, valorisant ainsi par la même occasion la création d’autrui.

7. Découlant de ce principe, le jourdaniste est en faveur du partage global des œuvres de toute sorte. Mais bien sur, le jourdaniste n’est pas dans une démarche de pillage des œuvres des autres. Chaque utilisation de la création d’autrui doit se faire en contrepartie de la valorisation de ce contenu d’une manière ou d’une autre. Le jourdaniste est donc naturellement un défenseur des licences Creative Commons qui proposent un cadre pour un partage responsable et milite plus largement pour une réforme du droit d’auteur et le déploiement de la culture libre.

8. La jourdanie n’est pas un pays (ne pas confondre avec la Jordanie). Le jourdanisme se veut international, non pas dans le sens où il veut imposer ses règles aux pays étrangers, mais dans le sens où il est favorable à un effacement des barrières (culturelles, linguistiques etc) qui sont à l’origine de guerres inutiles. Cela passant avant tout avec le dialogue, l’échange, et l’ouverture.

9. De tout les points précédents, on peut donc conclure naturellement que le jourdaniste est idéaliste. Mais cet idéalisme se situe évidemment dans un  horizon de long terme puisque le garde-fou de la raison le jourdaniste n’a pas encore franchi. Le jourdanisme n’est donc résolument pas révolutionnaire, mais évolutionnaire, il considère le changement nécessaire, mais la précipitation est l’écueil number 1 de sa propre démarche. Patience, évangélisme et pédagogie font partie de son lot quotidien de tâches digitales.

10. Le jourdaniste n’a pas pour vocation de remettre en cause l’Homme (qui n’a pas foncièrement changé depuis Adam et Eve), mais le système dans lequel ce dernier est bien souvent contraint d’agir. Néanmoins, parce que le système ne peut pas évoluer ex nihilo, l’Homme doit préalablement arriver à s’extirper de ce système réducteur de liberté et de libre arbitre. Il convient donc d’entamer une démarche que certains appellent révolution personnelle. Si cette révolution est devient massive, alors le reste suivra.

11. Le jourdanisme est en perpétuelle évolution. Il n’est donc pas figé dans le marbre numérique d’un vulgaire PDF (mais sera probablement réécrit sur une page dédiée, que je modifierai au fur et à mesure de mes « pérégrinations intellectuelles »).

12. Le jourdaniste considère l’échange comme la matière première clé de son apprentissage. A ce titre, il est impatient de lire vos réactions à la suite de cette lecture…

Note : A la relecture, je me suis rendu compte que ces réflexions sont inspirée à plusieurs égard de celles de Thierry Crouzet 😉

5 commentaires

  • Je prend un exemple. Le jourdanisme est égalitaire. Te lisant, lisant Thierry Crouzet, je me dis qu’ils parlent des subventions aux journaux par rapport aux blogueurs. Mais cela prend-t-il d’autres sujets ? Car l’égalitarisme est une notion hautement dangereuse (et je ne reviendrais pas sur l’histoire du communisme). Tu comprends ce que je veux dire ?

  • Oui je crois que je vois

    L’égalitarisme auquel je fais allusion concerne tous les domaines d’activité économiques. Mais ce n’est pas l’égalitarisme au sens de « garantir à tout prix l’égalité des situations des individus »qui consisterais alors justement à soutenir certaines entité au prétexte qu’elles sont défavorisées.

    En fait c’est plus l’égalité des traitements. Or, la meilleur égalité possible, c’est peut être de ne rien donner à personne… ou en tout cas ne rien donner tant que l’on ne peut pas être sur et certain de ne léser personne… ce qui est rarement le cas 😉

  • Clément

    Enfin, une page de pur Jourdanisme (mon esprit critique va pouvoir se dégourdir les jambes et même…se défouler! Mais non je plaisante), néologisme dont je suis fier d’avoir une part de la paternité, et que je vais donc m’empresser d’ajouter à mon dictionnaire Word!!!

    Tout d’abord, j’aimerais dire à Tristan qui a émis le premier commentaire, que comme Stan l’a dit, l’égalité signifie l’égalité de traitement, et non l’égalitarisme: Tout les hommes ont vocation à être égaux en droit, et non en fait (ça comme tu dis, c’est plutôt le communisme).

    En tout cas, très belle charte que tu nous écris là, je dois dire que je suis d’accord avec la majorité de ces valeurs, même si ces dernières restent assez générales (ça veut dire qu’on a plus de chances de se castagner sur l’application de ces valeurs!). Nul doute que tout le monde devrait les soutenir, et que si tel était le cas, on se retrouverait dans une société idéale!

    Je me permets d’apporter tout de même certains commentaires (sinon tu serais déçu, avoue!):
    Point 1 : Ta confiance en l’homme est admirable Stan et je dois dire que je la partage… jusqu’à un certain point. Bien sûr qu’il n’y a jamais de méchants ni de gentils dans l’absolu. Mais il ne faut pas pour autant que ça transforme en un espèce de nihilisme du style: On ne peut juger personne. Bien sûr que si on se doit de juger les gens, on en a même l’obligation, même si un jugement ad hominem est évidemment subjectif (quel jugement ne l’est pas?). Je pense qu’on a le droit de dire que les banquiers ont très mal agit avant et pendant la crise, qu’Hitler aurait dû comprendre que ses convictions anti juives n’étaient pas fondées et ne menaient à rien, et qu’Arthur doit comprendre que son émission les enfants de la télé est toute pourrie!
    Evidemment, cette affirmation doit être nuancée par tous les déterminismes qui influencent nos vies et nous empêchent d’avoir des choix libres! Enfin tout cela est un vaste débat!

    Point 8 : Tu es pour l’effacement des barrières culturelles et linguistiques: Entendrais tu par là l’effacement des cultures et des langues? En gros, tu voudrais uniformiser tout le monde ? Dans ces cas là je me dois d’être en désaccord avec toi! Je pense qu’on doit chacun respecter la différence de chacun dans la mesure ou elle ne porte pas préjudice aux autres. Je reconnais que je suis très différents des chinois, des arabes, des africains, et je ne vais pas aller leur imposer mode de vie et mes croyances, et ils ne vont pas venir m’imposer les miens! Je ne crois pas qu’on doive accepter chez nous des particularismes culturels néfastes sous prétexte d’un devoir de tout accepter et d’une mise à égalité de toutes les cultures Je ne crois pas non plus qu’on puisse réunir des gens qui ont vécu pendant des siècles différemment dans un même Etat et attendre une parfaite harmonie comme on le fait avec l’Europe (c’est là ou on est différent je pense tous les deux). Par contre je crois que chaque culture devrait respecter certaines valeurs universelles comme la tolérance, et le respect de la conviction d’un individu si elle ne nuit pas à celles des autres.

    Point 10 : Ce que tu conseilles sur la révolution personnelle va dans le bon sens, mais ce n’est pas forcément très précis. En général je pense que chaque individu doit réfléchir sur lui même pour pouvoir être capable de se fixer un cap. Jacques Attali définissait plusieurs valeurs et compétences pour qu’un individu, un pays, ou même une entreprise soit capable de survivre à n’importe qu’elle crise et puisse vivre comformément à ses valeurs:
    – Respect de soi: Etre capable de définir qui on est, son cap, sa place dans la société, ce qu’on souhaite, et de vivre conformément à ces valeurs (crucial pour être heureux!).
    – Intensité: Se projeter sur le long terme et former une vision de soi à 20 ans, à renouveler sans cesse mais savoir arbitrer en faveur d’un sacrifice immédiat s’il peut se révéler bénéfique à longue échéance tout en sachant que le temps est la seule véritable rareté
    – Empathie: Etre capable de comprendre les autres, de se mettre à leur place, et d’anticiper leur comportement, pour soit leur venir en aide, soit se protéger
    – Résilience: développer des stratégie de résistance et de défense, de plan de rechange face au différentes crises que l’on peut rencontrer
    – Créativité: Apprendre à transformer les menaces en opportunité et à rebondir sur les échecs pour s’améliorer ce qui exige une pensée positive, un refus de la résignation et une créativité pratique
    – Ubiquité: S’il n’est plus possible de vivre comme avant, être capable de changer, de se réinventer, tout en étant fidèle à ses valeurs
    – Pensée révolutionnaire: En situation de légitime défense ou de menace, être capable de ne pas respecter les règles du jeu, à ne pas tout accepter (notamment ce à quoi la société nous oblige) tout en gardant le respect de soi.

    C’est long mais je trouvais ça intéressant 😉

    Autre chose tu dis être égalitaire, et donc refuser d’aider des groupes ou des personnes même en situation défavorisée. Comment justifies tu cela ? Ne penses tu pas qu’aujourd’hui il est essentiel de réduire certaines inégalités entre les gens, d’un point de vu moral, mais aussi économique? Tu veux peut-être parler des majors du disque sous perfusion de l’Etat ;)? Je te laisse répondre à cela 😉

    Pour résumer, je suis d’accord quasiment avec tout. ta visions des choses est idéaliste et apaisée même si elle n’est pas forcément réaliste! J’admire le coté évolutionnaire, que peu de gens ont, et salue l’intelligence que le jourdaniste a de reconnaître les acquis de la société dans laquelle il vit et de ne pas faire que voir ce qu’il n’a pas !

    Vive le Jourdanisme et vive la France!

    • @Clément : merci pour ta réponse !

      Pour reprendre tes critiques (je suis quand même déçu, je m’attendais à pire … ) :

      confiance en l’homme : oui il y a une limite et ça n’empêche pas du tout qu’il y ait une justice, aussi imparfaite soit elle. C’est peut être par rapport aux sanctions qu’on peut progresser pour la rendre plus constructive, donner une vraie chance aux condamnés de se reprendre, faire valoir leur bon cotés. Je n’ai pas l’impression que cela soit le cas dans nos prisons actuellement…
      Juste pour rebondir sur les banquiers, ce n’est pas un bon exemple je crois car c’est l’exemple typiques de gens qui sont pris au milieu d’un système pervers à un tel point que leurs marges de manoeuvre, à part démissionner, sont très limitées, et je crois qu’ils sont aussi tellement aveuglés qu’ils ne voient pas l’absurdité du système. Mais j’ai bien compris ton idée sinon.

      Barrières culturelles : non bien sur que je ne souhaite pas l’uniformisation du monde ! Les différences sont un atout, même si elles posent certains problèmes. Je suis donc d’accord avec toi. Mon point était plus de dire que’il faut favoriser les échanges à tous les niveaux pour diminuer les incompréhensions interculturelles, et donc améliorer le respect et la tolérance que tu soulignes :).

      révolution personnelle : Je ne voulais justement pas détailler car le lien vers l’article de Jean Phillipe me semble pertinent. Mais je vois que tu as bien saisi la chose, tu es sur la bonne voie !!

      Egalité : Tu soulèves un point très intéressant. Et à vrai dire j’attendais que tu me poses cette question… 😉 Il faut différencier l’aide unilatérale provenant d’une entité très impersonnelle comme l’Etat des aides bilatérales entre personnes.
      Dans le premier cas, le caractère impersonnel de l’entité aidante entraine un manque absolu de sentiment de reconnaissance et de devoir quelque chose en retour. C’est du tout bénef sans contrepartie. Dans le cas d’une industrie subventionnée, on voit bien ce que cela donne : absolument aucune contrepartie n’est respectée (usines fermées quelques années plus tard etc).
      Dans le second cas, non seulement la personne qui aide sera valorisée socialement et personnellement (bonne conscience etc), mais l’individu aidé aura davantage le sentiment de devoir quelque chose en retour. L’échange n’est donc pas unilatéral, ce qui change beaucoup de chose au final. Cela crée des liens entre les gens, augmente la confiance mutuelle etc. La solidarité down-down est donc très positive.
      (Ca répond ?)

      NB :Comme tu le vois j’ai (presque) fait exprès de revenir à des bases qui ont peu de rapport avec la discussion initiale. Je sais au moins maintenant qu’on a un socle de valeurs communes 🙂 (mais je m’en doutais déjà 🙂 ). Cette base va nous permettre de progresser jusqu’à trouver les points de désaccord précis. La démarche inverse a clairement trouvé ses limites ;-).

  • Tout ça me parait bien bon!